1. Le traitement de la migraine
Plusieurs médicaments peuvent être utilisés pour traiter la migraine :
l’aspirine et le paracétamol, parfois associés à un anti-vomitif ;
les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS) ;
le tartrate d’ergotamine ou la dihydroergotamine (dérivés de l’ergot du seigle), qui permettent la vasoconstriction ;
les triptans sont des agonistes de la sérotonine. Ils se fixent sur certains récepteurs de la sérotonine. Ils ont un effet vasoconstricteur et inhibent l’inflammation. Les triptans n’ont aucun effet sur les auras et ne traitent que la phase douloureuse.
Ergot du seigle (champignon parasite formant des sclérotes : petites masses sombres dans les épis de céréales). Source : UIC Champagne Ardennes, image libre de droits.
2. Le traitement de fond
Seulement 5 à 10 % des migraineux suivent un traitement de fond. Celui-ci dépend des individus. La dihydroergotamine peut être utilisée en traitement de fond. Elle permet de maintenir un tonus vasomoteur stable en limitant les variations de diamètre des vaisseaux sanguins. Des antisérotonines peuvent être prescrites.
La sérotonine a deux rôles dans la migraine, dans la variation du diamètre des vaisseaux sanguins et dans le contrôle de la douleur. Plusieurs anti-sérotonines existent : le méthysegide, le pizotifène, l’oxétorone. Les bêtabloquants peuvent être utilisés ; ils se fixent sur les récepteurs des catécholamines.
Chez les migraineux dont les crises sont déclenchées par certains aliments (voir fiche questions-réponses), on évitera la consommation des aliments “à risque”.
Enfin, ceux qui sont sensibles à des facteurs psychologiques pourront recevoir des tranquillisants, mais ils devront chercher à se relaxer et améliorer leurs conditions de vie pour limiter les situations stressantes.
Un stress ou une contrariété peuvent-ils être à l’origine d’une crise de migraine ?
Les migraineux sont particulièrement sensibles au stress. Pendant un épisode de stress, le taux de catécholamines, comme l’adrénaline ou la noradrénaline, augmente dans le sang. 3 heures avant la migraine au réveil, on observe chez les patients présentant ce type de migraine une augmentation du taux de noradrénaline dans le sang. Il a été montré que les migraineux sont hypersensibles à une autre catécholamine, la dopamine. De façon général, chez les migraineux, les émotions et les contrariétés peuvent influencer la survenue des crises. Ceci peut être dû aux sécrétions de catécholamines et de sérotonine.
La migraine est-elle une maladie typiquement féminine ? Est-elle causée par les hormones ovariennes ?
La migraine touche trois fois plus de femmes que d’hommes. L’idée que les hormones ovariennes soient une cause des migraines découle de plusieurs observations :
la migraine démarre souvent aux alentours de la puberté ;
beaucoup de femmes constatent que les crises migraineuses ont lieu un peu avant ou juste après le premier jour des règles ;
les crises migraineuses disparaissent souvent pendant la grossesse ;
certaines migraineuses voient leurs crises disparaître avec la ménopause.
Plus que les hormones ovariennes elles-mêmes, c’est la variation des taux plasmatiques de ces hormones qui semblent constituer un facteur déclenchant des crises. Ainsi, lorsque les taux d’hormones chutent au moment des règles, les crises migraineuses sont courantes.
La migraine est-elle une maladie héréditaire ?
Bon nombre de migraineux ont un proche qui souffre de migraine. Il existe une forme de migraine familiale très rare : la migraine hémiplégique familiale. Il s’agit d’une migraine avec aura caractérisée par l’apparition d’une hémiplégie lors de l’aura. Trois gènes impliqués dans cette migraine ont été identifiés (voir focus recherche). Il est probable que la migraine soit due à certains facteurs de susceptibilité neurovasculaire. Associés à des facteurs environnementaux (alimentation, emploi stressant…), ils conduiraient à la migraine.
Certains aliments peuvent-ils causer une crise migraineuse ?
Plus de la moitié des migraineux souffrent de troubles digestifs pendant leurs crises. Un facteur alimentaire pourrait en être responsable. Certains migraineux voient leurs crises déclenchées par un aliment (vin rouge, fromage, chocolat). Ceci pourrait être dû à des amines proches des catécholamines, la tyramine et la phényléthylamine, présentes dans ces aliments.
Michel Lantéri-Minet est chef de service du Département d’Evaluation et de Traitement de la Douleur au CHU de Nice et spécialiste de la migraine. Il fait le bilan des principales pistes de recherche envisagées dans le domaine de la migraine.
Où en est la recherche sur les gènes impliqués dans la migraine ?
La génétique de la migraine a été étudiée sur la migraine hémiplégique familiale qui est une forme rare de migraine caractérisée par une aura motrice et une transmission autosomique dominante. Trois gènes codant pour des protéines impliquées dans le contrôle de l’excitabilité cellulaire ont été identifiés :
le gène CACNA1A codant pour un canal calcique neuronal ;
Le gène ATP1A2, qui code pour une pompe à Sodium/Potassium présente sur les astrocytes ;
Le gène SCN1A, qui code pour un canal sodique des neurones.
Les mutations de ces trois gènes ne se retrouvent que rarement dans les migraines “banales” qui impliquent probablement d’autres gènes en cours d’identification. De plus, dans ses formes habituelles, la migraine doit être une maladie polygénique impliquant plusieurs gènes. Un autre élément intéressant est qu’il a été possible de fabriquer une souris dans laquelle on a introduit une mutation humaine du gène CACNA1A. Cette souris transgénique développe des crises avec aura motrice comme l’humain et est très photophobe. Les femelles sont plus touchées que les mâles. C’est un modèle animal de la migraine avec aura.
Pourrait-on envisager un traitement hormonal de la migraine chez les femmes ?
Nous le faisons déjà. Nous le proposons aux patientes qui ont 90 % des crises pendant la période menstruelle. Chez ces patientes, le facteur déclenchant de la crise est la chute d’œstrogènes qui précède la période menstruelle. On atténue la chute ostrogénique en donnant de l’œstradiol. C’est une prévention des crises. Il est aussi envisagé d’utiliser un contraceptif en continu, avec uniquement un progestatif, mais pour l’instant cette approche n’a pas été validée.
Il y aurait des inconvénients au niveau gynécologique. Le problème des femmes qui font des crises migraineuses au moment des règles est que ces crises sont de longue durée. Les patientes l’appréhendent psychologiquement et cela participe à aggraver la maladie.
L’imagerie médicale peut-elle servir à comprendre la migraine ?
Oui, l’imagerie a servi pour deux axes de recherche. D’une part, nous avons pu visualiser la dépression corticale envahissante dans le cas des migraines avec aura, par l’utilisation de l’IRM fonctionnelle. Nous avons montré que l’aura est contemporaine de cette dépression corticale. De plus, l’imagerie médicale permet de mettre en évidence les structures qui s’activent dans les zones génératrices de la migraine. Ces régions s’activent anormalement. En faisant
l’étude en début de crise, alors que la douleur a été contrôlée par le traitement, on a pu montrer que l’activation de ces régions persiste. Ces données ont été notamment obtenues par l’équipe du Professeur Géraud de Toulouse..
Sur Futura-Sciences
Voyage dans le cerveau
Les migraines améliorent la mémoire
TMS : Le pistolet magnétique qui abat votre migraine